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Approches Sociolinguistiques (Si Moussa), Cours n°2: le 20/11/02 Analyse sociolinguistique à la Réunion
Analyse des variétés de créoles et de français. Situation de continuum linguistique M.J. Hubert Delisle (1994) confirme qu'il existe maintenant une autonomie par rapport au français mais en même temps, il est très complexe de tracer des frontières entre créole et français. Continuum de l'acrolecte au basilecte : Réalité linguistique actuelle. Beniamino et
Baggionni (1933) disent que l'implantation du français précède la
naissance du créole. Des locuteurs l'ont toujours eu comme langue
maternelle et il existe parallèlement un français créolisé qui est
parlé par la population blanche des hauts et est assimilé le plus
souvent à un créole acrolectale.
Bases pour une analyse sociologique de la situation linguistique : il montre comment le continuum linguistique se modifie en fonction des transformations sociales et des réussites économiques de certains groupes de population. Le français standard est une langue de statut social élevé. Le créole a une place de plus en plus large notamment qui à un souci d'efficacité dans la communication. Il existe plusieurs normes réunionnaises (sociolinguistiques) :
Baggionni (1994) : remise en cause de la situation réunionnaise qui correspond à une diglossie. Parle créole et français mais il y a des pratiques langagières. Continuum créole - français voir plusieurs continuum.
Continuum : ethnicogéographique, situationnel, social.
Explication aux variétés de créoles dans l'île : La Réunion est restée longtemps isolée du reste du monde et il y avait une difficulté de communication à l'intérieur de l'île. Augmentation du brassage, exode rural permet la remise en cause de la situation initiale. Usage différencié d'une langue de l'autre selon les catégories sociales, le type de conversation et le statut familial des interlocuteurs. L'usage du créole a évolué dans les médias, dans les sermons à l'église, dans les discours d'homme publics donc dans l'espace public énonciatif en général.
Questions de scolarisation Carayol et Chaudenson : Le système éducatif a été adapté uniquement pour les enfants de la petite bourgeoisie et s'est révélé inapte à franciser les masses créolophones. Selon eux, pendant longtemps le système éducatif transpose purement et simplement le modèle métropolitain sous prétexte qu'une adaptation de ce système pouvait remettre en cause les statuts départementale et l'appartenance nationale de l'île.
Bilan de l'école : L'école a sans doute contribuer à la connaissance, la diffusion du français à la Réunion mais il y a eu aussi l'influence des moyens de communication, des médias. Conséquences : développement de formes non-codifiées, instables, intermédiaire du langage, différents niveaux de créoles. Situation sociolinguistique actuelle se caractérise par des représentations du créole et du français. Actuellement, le créole n'est plus dévalorisé, il est utilisé quasiment dans tous les domaines sociaux mais en même temps le français est signe de perte d'identité, d'autres le rejette radicalement notamment pour la communication familiale. La culture s'apparente avec la langue créole qui est la langue maternelle de la grande majorité" des enfants.
Représentation du créole et du français : A. Gauvin (1977), il oppose le point de vue des
linguistes et l'opinion de nombreux réunionnais. De nombreux
réunionnais considèrent le créole comme un patois, dialecte alors que
pour tous les linguistes, le créole est une langue. Ex : Absence de graphie mais sachant que beaucoup de langues non-écrites sont devenues langues nationales. Le créole ne peut pas exprimer des idées abstraites, manque de précision en fait c'est un problème de développement. Selon lui toutes les langues ont des potentialités équivalentes. Carayol
et Chaudenson ont mené une enquête au près d'interlocuteurs unilingue
créolophone (1978) : - Concernant le créole, il n'est pas hostile et contrairement aux diglotes, les unilingues manifestent de la sympathie pour le créole, ils sont heureux de parler créole et craignent de le voir disparaître un jour. - Concernant les variétés de créoles régionales, l'opinion est plus partagée, il y a un jugement dépréciatif de telle ou telle communauté en particulier des locuteurs blancs envers les façons de parler des cafres, malbars, chinois. - Certains considères que le vrai créole est le créole acrolectal et d'autres considère que c'est le créole cafre. P. Cellier montre la grande diversité de langues créoles, il est donc important de comprendre le sentiment linguistique des créolophones sur les relations créole - français et aussi les différentes variétés de créoles. Un contexte de minoration linguistique joue sur la déculturation au niveau de l'habitat, cuisine, perception de la métropole. Dans le domaine éducatif ça se fait par correction Représentations : le français est une langue monolithique exempt de variations alors que le créole est considéré comme une langue éclatée, régionalisée, ethnicisée. Comparaison français - créole : Le français adversaire du créole en milieu scolaire? Représentation relativement agressive : français abâtardit. Le créole n'est pas capable de promouvoir de vraies cultures, il est laid, n'a pas de grammaire, le rôle du français est de faire disparaître le créole de l'école. Phénomène de déstructuration dans le discours, comportements chez les écoliers, les adultes qui se croient obligés de s'exprimer en français. Le sentiment linguistique est la cause et l'effet d'une hiérarchisation sociolinguistique en lien directe avec la position occupée par la société.
Cellier montre qu'il existe le diglote passif (qui ne maîtrise pas bien le français) et le diglote actif. Le diglote passif ne voit pas bien les frontières entre créole et français, il y a un rejet inconscient du français. Le diglote actif : couche moyenne ou supérieure, il utilise le français régional qui se caractérise par des emprunts, créolisme interférences. Il a une attitude dépréciative radicale du créole. Cellier s'intéresse aussi à la question scolaire, pour lui certes l'enfant s'éveille dans une langue maternelle de sa mère mais aussi dans la situation diglossique de sa mère : écoute familiale. Dans le contexte familial, il y a une perception du créole par rapport au français qui va être infirmé par l'arrivée dans le système éducatif. Décalage entre la position de lettrés et de l'institution scolaire qui évoque des normes de références liées aux variétés de créoles alors que pour certains locuteurs les normes de références pour l'école est le français quelque soit la langue maternelle. En 1985, une affiche d'information médicale rédigée en créole a eu des réactions très vives de rejet. Cellier estime le pourcentage de personnes qui pourraient être concernées par une affiche rédigée en créole (sondages des pratique linguistiques), il exclu les métropolitains 4% les analphabètes 29%, il reste 67% de lecteurs potentiels des quels ils retirent les lecteurs actifs du français, il reste 57% de personnes qui sont tournées plus vers le créole que vers le français. Critiques de l'affiche : Terme d'humiliation , atteinte à la dignité ressentie dans l'utilisation du créole. Une autre séries de critiques portait sur la difficulté de lecture, le déchiffrage, les lacunes étymologiques. Il y a dans ces réactions un certains nombres d'erreurs, de mensonges, de sous-entendus. 2 problématiques reconnues :
Réactions négatives émanant le plus souvent d'une catégorie de population comme étant la petite bourgeoisie urbaine. La bourgeoisie urbaine étudiée par D. Baggionni (1989, 1994), il met en relation la déculturation d'une partie de la population réunionnaise avec un discours identitaire nouveau de la petite bourgeoisie urbaine dont le mode de vie est assimilable en grande partie à celui des français métropolitains de même statut social résidant à la Réunion. Il faut mettre de côté le social dans le secteur public pour construire un opposition entre "peuple réunionnais " non-stratifié socialement les "fonctionnaires métropolitains". La stratégie consiste par voie de presse à entretenir un polémique autour du thème des avantages apparents réservés aux fonctionnaires métropolitains.
Le discours occulte la réalité socioéconomique de l'île 1/3 de la population a des revenus stables et confortables, elle profite des progrès de la modernisation et 2/3 autres de la population sont exclus des nouveaux emplois et subissent les conséquences de la suppression d'emploi dans le secteur productif traditionnel. Le discours de la petite bourgeoisie ignore cette réalité ainsi que la dérive de l'artisanat et évoque des perspectives de rattrapage du retard qui serait permis par l'injection massive de capitaux extérieur. Ce discours se reflète dans les prises de positions de la classe politique locale avec des propositions très vagues, des objectifs tactique éphémères, retournement de veste fréquentes, des propositions théoriques incompatibles. Une référence à l'autre, l'altérité qui se traduit soit par l'admiration ou la haine du métropolitain soit par l'énumération des ethnies qui composent la population. En 1989, il y a une décision du Conseil Régional pour la formation des stewards et des hôtesses de l'air qui proposait que celle-ci soit réservée à toute personne vivant depuis 10 ans à la Réunion ou qui était née à la Réunion. Cette décision était raciste et anticonstitutionnelle, c'était une décision discriminatoire. Elle fut retirée par la suite. Baggionni évoque les difficultés auxquelles sont confrontées la petite bourgeoisie urbaine. Ce discours proclame dans un français châtier la nécessité de promouvoir le créole, 1ère contradiction. On fait l'apologie du mode de vie traditionnel tout en étalant un luxe ostentatoire. On vie à l'européenne en refusant d'être confondu avec des zoreils. Problème par rapport à la langue car le français standard est perçu comme une facteur de promotion sociale symbolique mais en même temps la petite bourgeoisie est en insécurité linguistique face aux zoreils. Il y a à la fois une revendication de conformité à la norme du français standard et en même temps la revendication du créole comme moyen d'expression identitaire. 2 fonctions distinctes pour le français et le créole : le créole est un instrument de communication qui a une valeur identitaire emblématique et bien entendu il n'est pas question d'avoir la moindre ingérence métropolitaine dans ce domaine. Le français est l'emblème de la promotion sociale, il peut y avoir coexistence séparées entre 2 langues, pas question non-plus d'un français régional. Baggionni montre que l'évolution importante du débat sur la question de la langue dans la société : 3 dates clés :
Au départ débat sur la reconnaissance d'une variété de créole par rapport au français et maintenant c'est sur la place à accorder au créole dans la société. J. Simonin (1994) : Représentation de 2 sœurs qui ont chacune un enfant dans la même clase et à l'occasion d'une enquête sont amenées à la question des rapports créole - français. Le français est perçu dans sa fonction utilitaire véhiculaire alors que le créole a une fonction vernaculaire. Dans les relations sociales d'interconnaissances, il va de soi de parler créole et parler français serait même incongru.
Les 2 sœurs n'envisagent pas que l'on puisse leur enlever le créole, elle le considère comme une langue à part entière aussi difficile à apprendre q'une autre langue. Il y a partage des territoires d'usages pour leurs enfants : français à l'école et créole à la maison. Mais on constate que l'enfant utilise également le français dans les libres services, ce qui pour elles, qui ne parlent que créole provoque un sentiment de gêne. L'une des 2 sœurs imagine gagner au millionnaire et se demande comment elle pourrait s'exprimer lors de l'émission télévisée à Paris.
Point de vue politique : L'analyse de la prise en compte politique de la question du créole fait principalement par Chaudenson : Il y a un intérêt pour la question du créole avec la mise en place de la départementalisation. Chaudenson montre les prises de position politique alternées du PCR à ce sujet : 1946 : Affirmation d'une absence de spécificité réunionnaise afin de fonder la volonté d'intégration. Changement de direction en 1959 : Arrivée de P. Vergès, mise en avant du principe d'autonomies et le Quotidien Témoignage accorde une place non-négligeable à la question du créole. Mais les prises de position sont éphémères et l'intérêt pour la question du créole resurgit au début des années 1970 avec 3 tendances exprimées au sein du PCR :
Remarque : les 2 dernières tendances se retrouvent à l'époque de toutes les autres formations politiques. Selon Chaudenson, les hommes politiques ont compris l'importance de l'enjeu mais certains ont tendance à assimiler reversement de la situation diglossique et indépendance politique. Alors la solution efficace serait un aménagement de la disposition selon Chaudenson Cette politique linguistique et culturelle ne peut se faire sans un vaste effort d'informations et d'explications auprès de la population. |